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Le contemplatif
9 mai 2017

Travail humanitaire en Afrique

L’hypothèse première de ce travail est que les pratiques des intervenants extérieurs au cœur des conflits internes et régionaux ne peuvent être considérées comme des variables affectant la seule issue de ces conflits, c’est-à-dire la régulation des violences en cours, mais bien comme des facteurs dans la genèse des nouvelles violences armées et de violations du droit international humanitaire. Toute organisation ou tout groupe professionnel qui se plonge dans une situation de conflit armé, comme au Darfour et au Sud-Soudan, peut faire l’objet d’une telle analyse. Or ce domaine d’activité de la gestion (ou « régulation ») internationale des conflits armés connaît une croissance fulgurante depuis la fin de la guerre froide, et surtout depuis le début des années 2000. Pour ce qui concerne l’ONU, en avril 2008, 17 opérations de maintien de la paix pilotées par le département des opérations de maintien de la paix de l’ONU mobilisent plus de 107 000 personnels (dont plus de 88 000 en uniforme), pour un coût total de 6,8 milliards de dollars pour l’exercice 2007-2008 (contre 3 milliards de dollars en 2001)2 . Et c’est sans évoquer les diverses autres organisations régionales ou opérationnelles engagées dans ce domaine. À force de répétition, et étant donné leur ampleur actuelle et leur professionnalisation, ces pratiques des gestionnaires internationaux des conflits armés donnent lieu à des apprentissages de la part des entrepreneurs desdites violences. Ces apprentissages concernent précisément les types de ressources qu’ils peuvent capter ou perdre dans leurs relations avec ces organisations internationales, selon les stratégies qu’ils adoptent pour conquérir ou conserver leurs positions décisionnelles. Ils ajustent donc leurs comportements politiques en fonction des pratiques des intervenants extérieurs, qui à leur tour corrigent ces dernières avec plus ou moins d’empressement et de succès. Ainsi, les organisateurs du génocide rwandais au printemps 1994 avaient appris de la débâcle des forces onusiennes et américaines en Somalie en 1993, lorsque, au lendemain de la mort du président rwandais, Sur le poids des ressources extérieures dans la survie de certains États nés des décolonisations, voir Jean-François Bayart, « L’Afrique dans le monde : une histoire d’extraversion », Critique internationale, 5, 1999, p. 97-120 ; ou encore Robert H. Jackson, Quasi-States : Sovereignty, International Relations and the Third World, Cambridge, Cambridge University Press, 1993. David Ambrosetti le 6 avril 1994, ils donnèrent l’ordre à la garde présidentielle d’assassiner le Premier ministre de transition, mais aussi dix Casques bleus belges qui protégeaient cette dernière, pour hâter le départ des Belges de la mission de l’ONU (la Minuar). Rétrospectivement, on songe également que ces mêmes partisans du Hutu Power envisageant une guerre totale contre les rebelles du Front patriotique rwandais (FPR) et une « solution finale » au « problème tutsi » avaient à plusieurs reprises testé la capacité de réaction de la Minuar face aux violations massives des droits de l’homme. Et d’ailleurs, selon André Guichaoua, le FPR ne fut pas en reste, durant l’hiver 1993-1994, dans ce travail d’évaluation et d’anticipation des réactions internationales en cas de reprises des violences.

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